Nous voici en Inde depuis maintenant 3 semaines. Trois semaines dans la famille d’Andjali a s’adapter tranquillement aux rythmes et aux bacteries de l’Inde. L’adaptation ce fait en douceur (mais pas sans anicroches). Faut dire que ca fait un moment que je me preparais : 6 mois avant de partir je m’entrainais deja a m’asseoir sur mes talons et pendant le pedalage Andjali me repetait que « l’Inde c’etait pareil qu’ici (ou on pedalait) mais en pire ».
En sortant de l’aeroport je m’attendais a etre assaillit par des foules de petits enfants dans une odeur de pot d’echappement, de feu de bois et d’epices avec un fond sonore de klaxons ininterrompus... Magie de l’imagination... ou simplement du vent, rien de tout ca en arrivant... a part un chauffeur de taxi, aucune solicitation, aucune odeur inhabituelle.

Apres plus de 8000km sur le bord de la route dans une douzaine de pays avec des cultures differentes on evolue, physiquement et mentalement, et l’arrivee en Inde n’est pas autant un choc que prevu... La mer noire, premiere fois que nous la rejoingnons, le plaisir d’etre la permet d’accepter de pique-niquer sur les plastiques qui jonchent le sol, les principes s’effritent...Depuis les Balkans, un peu partout sur le bord de la route les klaxons fusent pour nous encourager ou nous pousser sur le bas cote, on apprend a ne pas toujours le prendre personnellement. Marchander en Inde semble anecdotique lorsque dans la plaine du Syr Daria, tout, des cacahouettes au prix du trajet en train, est sujet a l’entourloupe. Apres un petit empoisonement alimentaire au Kazakhstan par de l’eau de citerne ou des shashliks mal cuites le corps se fortifie.

Par contre, 6 mois loin de chez soi, a essayer de s’adapter, entraine une certaine fatigue et nous ne sommes plus autant emmerveilles par les differences pour s’en rejouir ici ! (Un bon morceau de comte avec une salade verte manquent de temps en temps.) De plus le passage de la vie de nomade, libre de ses faits et gestes, a la peau de touriste fait un peu bizarre. Nous sommes dorenavant dependants des autres pour se loger et se deplacer (famille, bus, train, hotel...).

Nous avons passe nos premiers jours a Delhi chez Karuna, la cousine de la mere d’Andjali (Asha). Nos velos dans leurs boites ont trouve leur place sur le balcon. Ils vont nous attendre sagement pendant que nous explorons le sous-continent en transport en commun avec nos sacs a dos tout neufs et un guide de voyage. Apres quelques jours a prendre nos reperes nous decidons de partir pour les montagnes, avant qu’il ne fasse trop froid. De plus, notre presence chez Karuna s’ajoute a celle de ses 2 fils, son mari et son assistant, ainsi que le frere de son mari venu a Delhi pour une operation. Huit personnes dans l’appartement, nous nous sentons parfois un peu comme une charge en trop pour Karuna qui semble fatiguee et nous preferons partir pour revenir lorsque cela sera plus facile pour elle.

A Almora, 1600m d’altitude, Harsh, le cousin d’Asha nous accueille apres 12h de bus de nuit. Une nuit ou je n’ai pas vraiment dormi. Dans les bus du gouvernement, il y a 2 sieges a gauche et trois a droite. Je me retrouve donc avec Andjali a ma droite cote fenetre et un Indien cote gauche. Heureusement il etait assez dodu et lorsqu’il s’est endormi sur mon epaule j’ai pu, moi aussi, me caler ‘‘confortablement’’ contre lui. Nous sommes juste derriere le chauffeur (qui conduit non-stop pour tout le trajet), ce qui nous permet d’etendre un peu plus nos jambes et donne une place de choix pour profiter des klaxons et de la musique toute la nuit...Ici l’air est plus clair, certains jours, si nous allons au bon endroit nous pouvons voir les pointes enneigees de l’Himalaya Indien. Il est aussi plus facile de rencontrer des gens : les voisins du dessous, le vendeur de cacahouettes grillees, le sadhu du temple de Kasar Devi. Nous prenons du temps aussi pour lire notre guide de voyage et choisir ce que nous allons faire apres. En effet nous sommes arrives sans avoir prevu quoi que ce soit et l’Inde est un pays tellement vaste qu’il est difficile de choisir ou diriger nos pas. Comment eviter les masses de touristes tout en allant dans des coins sympas ?

Quelques jours plus tard, avec Harsh, sa femme Manvi et leur fille Geet, nous sommes montes jusqu’a Jhaltola, deuxieme maison de famille. Imaginez une ancienne plantation de the, cote sud un chemin part vers le sommet et le temple ou deux sadhus s’adonnent au plaisir du shilom pour se tenir chaud la nuit. Dans les trois autres directions cardinales la pente abrute permet d’avoir la vue sur les montagnes alentours. Au nord, la Nanda Devi qui domine l’Inde du haut de ses 7816m et sa chaine de montagne, a l’Est le Nepal. Plus bas, les terrasses sinueuses permettent aux habitants de produire de quoi vivre et nourir leurs 2-3 bufflonnes ou leurs 5 chevres. Nous sommes restes une grosse semaine sur place, a savourer la tranquillite, la vue sur les montagnes, le feu, les etoiles...

De retour a Almora, nous prenons quelques jours pour nous organiser pour le trajet vers Delhi, faire faire des petites sacoches pour avoir le passeport au pres du corps et donner un peu des nouvelles... Si il ne fait pas trop froid nous partons pour Benares, peut etre Darjeeling, le Nord-Est, pourquoi pas 10 jours de meditation vipassana, une visite a l’ashram d’Amma et du temps libre pour les imprevus...